Jusqu'à quand l'Etat a-t-il imposé une répartition des voitures fabriquées ?
Question d'origine :
Bonjour,
après la 2ième Guerre Mondiale il y avaient des déclarations ministérielles que les fabricants de voitures, dans le cas de Citroën, étaient en droit d'espérer que sur les 200 voitures fabriqués, il y en aurait: 150 réservées à l'exportation, 5 à la disposition des ministères et 45 en vente libre. Pourriez-vous m'informer jusqu'à quand (quelle année) ces déclarations étaient valables? Je pense que c'était jusqu'à 1950? Et est-ce que chaque année (de 1945-1950) c'était la même répartition?
Merci et cordialement,
Nico Michon
Réponse du Guichet
L'Office central de répartition des produits industriels (OCRPI) a été créé en septembre 1940 et a disparu le 1er avril 1949.
Bonjour,
L'Office central de répartition des produits industriels (OCRPI) a été créé par Henri Culmann (1907-1993) par la loi du 10 septembre 1940 et le décret du 18 septembre 1940. Ce service faisait partie de la Direction générale du contrôle économique.
Voici ce qu'indique le site France Archives :
"on met en place, sous la tutelle d'un Secrétariat de la répartition, un Office Central de Répartition des Produits Industriels (loi du 10 septembre 1940) qui ne disparaîtra que le 1er avril 1949 - pour discipliner la consommation et tirer le meilleur parti des ressources, au nom de l'intérêt public. La répartition concerne toutes les ressources de la production nationale et de l'importation.L'O.C.R.P.I. détermine les besoins de l'Etat, des collectivités, des entreprises privées et des consommateurs, en produits industriels.Ensuite il établit une hiérarchie d'utilité et d'urgence de ces besoins, en fonction de la continuité à assurer à la vie de la nation, de la reconstruction et des travaux d'avenir.Enfin il détermine tous les titulaires successifs d'une matière avec l'aide des Comités d'organisation.Il exerce donc un contrôle strict sur l'industrie.L'O.C.R.P.I. est divisé en sections, créées pour la plupart dès 1940 et dissoutes en 1945-1946, ayant chacune à leur tête un répartiteur. Chaque section fixe les règles d'acquisition de répartition, de stockage, de vente et de consommation des produits industriels. On en compte 15 : la section des Fontes-Pers-Aciers, la section des Métaux non ferreux, créée le 17 novembre 1940, la section Pétrole et Carburants, la section Corps gras industriels, la section Chimie, la section Textile, la section Papier-Carton, la section Cuir-Pelleterie, la section Caoutchouc-Amiante-Noir de fumée, la section Produits minéraux et Matériaux de Construction, la section Bois, la section Produits divers, la section Produits Finis et enfin la section Electricité. la section du Charbon devenue O.R.C.H.A.R.Mais c'est surtout la loi du 19 janvier 1943 qui définit la répartition et ses structures. Elle abroge la loi du 10 septembre 1940.Elle crée ou organise deux groupes d'organismes : d'une part, le Secrétariat de la Répartition (disparu en septembre 1944) et le Répartiteur Général, qui déterminent les modalités de répartition et sanctionnent les propositions des autres organismes ; d'autre part, l'O.C.R.P.I. qui comprend des sections de Répartition, une section de Récupération et de Mobilisation et une section Centrale. Celle-ci coordonne la répartition en surveillant la compatibilité des diverses décisions, coordonne les statistiques et les questions de sanctions, d'information, de propagande et d'organisation administrative et financière des sections. On trouve un répartiteur-chef à la tête de chaque section, assisté par un commissaire de gouvernement qui surveille les sections et dispose d'un droit de veto (il devient en 1943 "commissaire à la répartition").Les répartiteurs ont de grands pouvoirs. Ils obligent les producteurs à vendre à des acheteurs déterminés et les consommateurs à acheter à des fournisseurs déterminés. C'est donc la fin des transactions commerciales.Ils interdisent ou prescrivent l'emploi des produits pour certaines fabrications ou certains fabrications et ils ont la responsabilité du bon usage du produit qu'ils doivent suivre dans toutes les transformations jusqu'à leur utilisation finale.Enfin ils ordonnent la mise en vente, sous leur contrôle, de stocks préalablement constitués.Le principe est révolutionnaire et les caractères sont exceptionnels. Mais la mission est difficile et les infractions multiples.Cette organisation n'est pas temporaire, dans l'esprit de ses protagonistes. Pendant la guerre, elle ne peut avoir qu'un rôle statique mais, plus tard, elle devra devenir dynamique.Enfin il faut noter que le Nord et le Pas-de-Calais, zones interdites sont en dehors du système et complètement autonomes. Ils sont soumis à des organismes allemands jusqu'en mars 1942, date à laquelle ils sont réintégrés à l'O.C.R.P.I., par le biais des Bureaux régionaux de répartition, équivalents aux sections (dissous par l'ordonnance du 8 décembre 1944).Si, à peine le territoire libéré, une nouvelle organisation économique fut mise en place, l'économie de reconstruction ne fit, en réalité, que consolider le principe vichyssois de l'interventionnisme.Les ordonnances du 22 juin 1944 et du 7 octobre 1944 annulèrent les décisions antérieures en matière d'industrie et abrogèrent les nominations effectuées par Vichy. Les comités d'organisation furent maintenus provisoirement mais leurs pouvoirs furent transférés à des commissaires provisoires et à des Comités Consultatifs paritaires. Mais l'O.C.R.P.I. ne sera pas dissous avant le 1er avril 1949. Et "de très solides moyens furent aménagés au profit de l'Etat pour lui permettre de diriger l'économie". Les nationalisations se succédèrent à une cadence rapide de 1944 à 1946 (Mines du Nord-Pas-de-Calais, Renault, Gnôme et Rhône, entreprises de production, transport et distribution de gaz et d'électricité, compagnies d'assurances, entreprises de production des combustibles minéraux).
Vous trouverez un autre historique de l'OCRPI sur le site de France archives.
Nous vous renvoyons également vers cet article de Fabrice GRENARD qui retrace l'histoire de ce contrôle économique : «L'administration du contrôle économique en France, 1940-1950», Revue d’histoire moderne & contemporaine, 2010/2 (n° 57-2), p. 132-158. En voici quelques extraits :
Une loi du 6 juin 1942 transforma définitivement l’ancien service en une Direction générale du contrôle économique (DGCE), qui avait désormais des attributions s’étendant à toute la réglementation économique et ne se limitant plus au seul domaine des prix. Ce nouvel organisme était chargé de diriger l’ensemble des services qui participaient au contrôle économique : contrôle mobile du ravitaillement, police économique, agents de l’Office central de répartition des produits industriels (OCRPI)… Chaque service de contrôle restait dépendant de son propre ministère (Ravitaillement, Intérieur, Industrie) pour les questions d’ordre interne, mais devait se conformer aux directives de la DGCE pour l’orientation de ses enquêtes et la communication des résultats obtenus. Au niveau de ce qui relevait de la répression, la DGCE se trouvait désormais sous la responsabilité du nouveau secrétaire général à la Police, René Bousquet, qui allait s’efforcer d’en faire un appareil plus efficace et plus moderne dans la lutte contre le marché noir et les différentes fraudes économiques. À travers Bousquet, la DGCE se trouvait également davantage rattachée à l’autorité du président du Conseil et ministre de l’Intérieur, Pierre Laval, que ne l’était l’ancien service des prix.
[...]
L’année 1947, à travers sa mobilisation dans le cadre de la politique de baisse des prix, constitua véritablement le chant du cygne du contrôle économique. Au sein du gouvernement, la tendance libérale s’imposait progressivement à partir de 1948, scellant ainsi le sort de cette administration. La disparition des pénuries à partir de 1948-1949, le rétablissement de l’équilibre entre l’offre et la demande, et l’accélération de la croissance rendaient le maintien d’un contrôle économique inutile. Après une année de tergiversations, la DGCEE disparaissait en tant que service autonome, par décret du 26 février 1949 présenté par le ministre des Finances, Maurice Petsche. L’ancienne administration était fondue dans une Direction générale des prix et du contrôle économique ayant pour mission de maintenir un contrôle minimal par précaution. La Direction générale des prix et du contrôle économique perdait définitivement sa qualité de contrôle en janvier 1952 (devenant Direction générale du commerce intérieur et des prix). L’héritier lointain du contrôle économique sera la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (janvier 1986).
Nous n'avons en revanche pas trouvé d'informations sur les changements de "répartition" de la production automobile d'une année sur l'autre. Nous ne pouvons que vous orienter vers les documents mentionnés dans cette Bibliographie sur les CO et l'OCRPI ainsi que vers les services d'archives, notamment les archives du Commissariat général à la mobilisation industrielle.
Bonne journée.